BEN LADEN - GEORGE W. BUSH: MATCH NUL
par Kalypso
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Ville de New York, États-Unis, 11 septembre 2001 - Il est encore tôt en ce mardi matin. Au Centre de commerce mondial de New York, dans des bureaux qu’on imagine capitonnés et richement décorés, les cadres s’affairent, brassant affaires et dollars comme à l’accoutumée. Personne n’a le temps de regarder au-delà des fenêtres en se demandant, comme le veut le conte : « Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir ? » Sans doute quelqu’un aurait-il dû le faire: deux heures plus tard, les tours 1 et 2 du World Trade Center ne sont plus que décombres fumant, seuls vestiges du symbole ultime de la puissance financière américaine, et gisent, pantelants, dans le quartier de Wall Street. Sous ces millions de tonnes de gravas, les cadres ne s’affairent plus et ne brassent plus les dollars : leur vie s’en est allée.

   Leur mort, elle, risque de laisser des traces historiques.

   Dans les médias, les faits de ces tragiques événements sont relatés jusqu’à l’écoeurement. Pas moyen de louper, pour la millième fois, la séquence filmée de l’écrasement du second avion sur les étages supérieurs de la tour no 2 du World Trade Center : CNN ne dérougit pas, entraînant dans son sillage les autres réseaux d’information, en Amérique du Nord comme ailleurs dans le monde.

   Tiens, d’ailleurs, ils ont la télé en Afghanistan ou au Pakistan? Il faut croire que oui. Quelques jours plus tard, l’annonce d’une riposte vindicative de George Bush fils vient chatouiller les oreilles d’Oussama Ben Laden, grand gourou du terrorrisme et richissime héritier, puliquement tenu responsable (ne pinaillons pas sur les mots : « Suspect No 1 », dans les bouches américaines veut dire « Responsable principal », c’est de l’anglais, ‘faut pas chercher…) de ces assauts. Première réaction d’Oussama Ben Laden: la négation la plus totale quant à l’implication dans ces actes.

   Coupable ou pas coupable ? (innocent n’existe pas dans ce contexte). On s’en fout, avec tout ce qu’il nous a déjà donné comme fil à retordre dans le passé, niveau terrorrisme, autant que ça lui retombe sur le coin de la gueule. Et puis, un problème sans solution n’existe pas dans les adages des États (fortement) Unis derrière ce massacre. Il FAUT un coupable. Celui qui aura le passé le plus conséquent va écoper. Tra la li la lère.

   Depuis la lorgnette de Ben Laden, voyons ce qui se passe.
Comme un gosse constamment mal luné, il réclame depuis des années une bonne baffe : ses tentatives terroristes précédentes n’ayant réussi qu’à le ficher au FBI (récompense : 5,000,000$ le 12 septembre, 25,000,000$ le 22 septembre), ses vues ont pris de l’envergure et il s’est attaqué aux symboles financiers et militaires des États-Unis. Il a loupé de peu le Président et la Maison-Blanche. Une réussite, dans ce dernier cas, et c’était Monopoly.

   C’est qu’ils doivent drôlement l’agacer, ces Américains. Cette population, historiquement formée d’immigrants vaillants et courageux, ne souffre pas seulement de sa décadence alimentaire, financière et morale. On y retrouve un patriotisme sans bornes qui ne s’est sans doute jamais affirmé avec autant de virulence… que depuis ces évènements. Ce qui irritait si intensément Ben Laden se voit aujourd’hui décuplé. Effet boomerang que ce soi-disant stratège terrorriste aurait dû anticiper.

   Côté américain, et depuis la guerre du Golfe plus particulièrement, on a envie de casser du turban. D’autant plus que le cas Saddam Hussein n’a jamais trouvé de véritable solution. Alors, l’occasion de recommencer une bonne gué-guerre afin d’imposer une bonne fois pour toute une hégémonie totale se présente.

   La « Campagne » de Bush s’amorce comme une campagne de publicité bien orchestrée. Les médias suivent derrière, heureux de faire exploser leur cote d’écoute. Les populations horrifiées et réclamant une revanche (à défaut d’une vengeance avouée, puisqu’elles sont dites civilisées, ne l’oublions pas) des pays alliés n’attendent plus, sagement, que le grand spectacle annoncé.

   « Mais que va-t-il donc se passer ? », se demande tout un chacun. Les plus vieux font sagement des réserves de sucre et de pommes de terre dans les caves, puisqu’ils ont connu la Grande Guerre jadis, et que, quand l’Armée se pointe dans sa propre rue, la famine, surtout, est en route. « Qui veut la paix prépare la guerre », je n’invente rien.

   D’autres, plus jeunes, se marrent devant leur cinéma-maison (on ne dit plus « téléviseur », on dit « cinéma-maison »), ou pinaillent leur idéal de paix. On discute, on discoure, on lève le poing : les opinions montent et se démontent, chacun y va de sa rengaine. Les artistes politisés apprennent à prononcer « Sales fumiers » en langue afghane; la génération Nintendo se renseigne sur la véritable artillerie qui sera utilisée contre l’ennemi en lançant des « Wow ! C’est full cool ! », sans penser qu’après « Game Over », on ne peut plus rejouer; les indifférents, même eux, ne peuvent s’empêcher de susurrer du bout des lèvres : « Cette propagande guerrière, quelle connerie ! ». Les baby-boomers revoient le Vietnam en silence, comme un film qu’on repasse; les médias frétillent sous le couvert (noble) de l’information, qui se transforme (déjà!) en sur-information ; et la liste est longue des innombrables réactions que suscite ce nouveau conflit qu’on appelle, pour mousser l’excitation, la Troisième Guerre Mondiale

   Et puis, derrière tout cet imbroglio, plane le mystère, élément fondamental du drame : « Où se cache Ben Laden ? », comme si on partait à la recherche de Carmen San Diego (jeu fort connu des enfants).

   De ce point de vue cynique, on dirait que cette nouvelle explosion guerrière arrange les principaux intéressés, à savoir les États-Unis et les pays du Moyen-Orient. Les USA, parce que dans le cas d’une victoire, risquent fortement de réaffirmer leur puissance, et ce, à tous les niveaux. Le Moyen-Orient, parce qu’enfin on le considère comme un ennemi de taille, qu’on ne peut repousser dans ses déserts et ses derricks du revers de la main.

   La guerre au terrorisme? Je pouffe d’indignation!
 
 

Kalypso
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