CANNABIS FONDANT 3
(MELTING POT)
par David Pêle-Mêle
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La série Cannabis Fondant, comme son nom l'indique, est un grand « melting pot » dans lequel David Pêle-Mêle (devenu, récemment, fou à lier) verse, en guise de thérapie, son fiel corrosif sur tous les sujets qui l'horripilent, et ceux-ci sont légion, évidemment. C'est ce mois-ci sa troisième séance; le toubib commence à fatiguer!
 


MA THÉRAPIE LÉGÈRE
Tierce fournée

   Quelle barbe. Je suis blâsé en ce moment, Gary, vous savez. Nous sommes, à Ma Commune Légère, les rémoras de la pop culture, et sans que cela n'y paraisse, elle dégringole, cette dernière, sans que le vigoureux Umour hyperbolique de nos collaborateurs n'y fasse grand-chose. On ne peut plus sauver la pop culture de sa déchéance, alors nous sommes là dans nos divans de cuir râpé à regarder le monde sur les 73559573552.1 chaînes toutes semblables du Câble (un câble, une chaîne: quel cachot!), ou sur Internet, indifférents, en mâchant du septmoncel et en buvant du Guru ou du jus de pruneaux au miel, ou Dieu sait quelle autre potion médiocre. L'inspiration fait un saut, de temps en temps, en la personne de l'ami Del Monte, mais pas souvent: il fait trop chaud et gluant ces jours-ci...

   Vous savez docteur, on ne fait pas beaucoup de fric avec le site Ma Commune Légère, et le peu d'oseille qu'on se fait, comme l'a dit le Français jadis, le Rastaquouère le flambe, pour ses escortes. Je m'en fous, parce que le simple fait de produire une page Web, telle que celle-ci, chaque mois, c'est vachement chié, comme disait aussi le Français. Ce qui m'emmerde, c'est le nombre de jeunes néophytes, internautes débutants et incapables, qui nous écrivent afin de nous dire d'arrêter de leur envoyer un e-mail chaque mois lorsqu'on a du nouveau matériel en ligne. C'est d'un ridicule qui occis! On envoie des e-mails exclusivement à ceux de nos lecteurs qui sont « abonnés à la liste de diffusion », comme on dit chez les snobs, et s'ils se sont abonnés, ils peuvent se désabonner: c'est le même sacrament de clic de la même putain de souris, au même putain de bordel de merde d'endroit facile à trouver, mais un pouce plus bas sur l'écran. Les gens s'abonnent. « Cliquez ici pour vous abonner... » Un pouce plus bas il est inscrit: « Cliquez ici pour vous désabonner. » Mais non: ils ne comprennent pas cela! Ils écrivent à la Rédaction, fâchés et impolis, et, dans un français ma foi caduque à l'excès, nous disent de « Aretez envoyé vos cris d'email tabarnac. », chose qui une fois traduite du Swahili signifie: Désabonnez-moi... Ces gens malheureux ne réalisent pas qu'ils ont cliqué beaucoup plus de fois, pour nous écrire ces délicates lignes en vieux Bantou... qu'ils n'auraient eu besoin de le faire pour se DÉSABONNER eux-mêmes, par magie. On voit de tout sur le Web. Depuis cinq ans, nous avons fait des farces sur presque tout, les ministres, les gens, les coutumes, les modes, les arts, la politique, la science, la religion, Kate Moss, les écolos, les fachos, les gros, les prolos, alouette. Tout. Et soudain un mec nous écrit un courriel succinct: « Alles chiéz avec votre crisse de coran! » Oui. On a mentionné le Coran dans la liste de diffusion un mois plus tôt, mais quoi? Quoi? Après tout ce dont nous nous sommes moqués impunément, depuis cinq ans, brusquement, il y a un gars qui saute une coche mais pas parce qu'on a fait coucher Louise Beaudoin avec un gorille, et ni parce qu'on a fait bouillir tous les acteurs de Watatatow dans une marmite, non: parce qu'on a dit « Une Sourate du Coran ordonne de pas manger chez McDo » ou quelque chose du même acabit. Et v'là le mecton qui pète un plomb! Inexpliqué... Comme le magazine de 1982 du même nom.

 *

   Je conchis, docteur, les programmes à la télé où le héros est un Gros Con. Je ne parlerai même plus de Homer, parce qu'il outrepasse les limites du Con, et qu'il est un dessin animé. Mais il semble en ce moment et depuis un bout de brousse y avoir à l'écran des sortes d'anti-héros Gros Cons, faits sans doute pour remonter le moral des Gros Cons réels que nous sommes dans la réalité vraie, puisque dans les foyers des millions de demi-Gros semi-Cons se disent à part eux en regardant Everybody Loves Raymond: « Je suis moins pire que cela moi, au moins! » Car Raymond est un gros zéro pointé qui n'aime que regarder la télé et se poigner le cul à deux mains en appliquant la Loi du Moindre Effort à la lettre. Il a un Q.I. d'adolescent, et il ferait n'importe quoi pour un match de football, des bonbons ou une bière. Excellent sous-homme s'il en est. Il y a aussi Ladies Man et King of Queens: gros bon à rien qui n'aspire qu'à regarder le Super Bowl trois cent soixante-cinq jours par an et surtout à boire de la bière-pisse américaine avec ses nuls d'amis jusqu'à sa mort. Ils ne sont tous qu'un seul et même personnage de Gros Con dysfonctionnel, puéril, paresseux, lâche, poltron, mais quand même honnête, en bout de ligne, au grand coeur, et cetera. Puis il y a Tony Soprano, Gros Con de l'autre côté de la médaille, message à tous les Gros Cons de la terre qui dit: vous voyez, on peut être chauve, bedonnant, laid, idiot, empoté, et tout de même viril et inspirant la terreur. Brrr! I'm shaking, dude. « Euh, je rêvais que je dévissais mon nombril... et alors mon pénis tombait par terre... » dixit Tony Soprano. Uuuh? Bouga-bougah! Ougli-ougli? Groûmph-groûmph! Gros crétin, va (et les scripteurs de la série aussi).

   Vous au moins, docteur Gary, vous n'êtes pas Gros et vous n'êtes pas Con. Charlotte vous adore et moi aussi je vous aime bien malgré votre grand nez à la Yves Jacques, hé! hé!

 *

   Je vois des complots partout, docteur! Stockwell Day par exemple est-il victime d'une sorte de putsch? (Quel beau mot, putsch! C'est tout regorgeant de postillons.) Mais bon, dites-moi, qu'est-ce donc qui se passe avec Stockwell Day? Pourquoi LA PLANÈTE entière espère qu'il démissionne? Qu'est-ce qu'il a fait de si terrible? Il est un peu laid? Chrétien et Duceppe et Clark itou! Il n'a aucun charisme? Chrétien et Duceppe et Clark itou! C'est un cave? Chrétien et Clark et Duceppe... est-ce que j'ai vraiment besoin de poursuivre? Ce que je voudrais savoir c'est: en quoi Stockwell Day est-il pire que les autres imbéciles chroniques du Fédéral? Est-il à ce point plus nul, plus con, plus idiot que les glands fromagifères que sont Chrétien, Clark, Duceppe et compagnie? Je ne vois pas en quoi. Quoi? C'est un politicien fadasse comme les autres. Alors, qu'est-ce que c'est que cette hystérie collective? Tout le monde sans exception essaie donc à tel point de le crucifier, que je vais bientôt commencer à penser que c'était, peut-être, un bon gars... Il doit y avoir une certaine raison « cachée » à cette hystérie de lynchage public.

   Dédé Fortin: autre complot. Ça fait combien de mois, qu'il s'est « suicidé »? Quelqu'un a-t-il eu du feedback à ce sujet? Non. Rien! Pas un mot. Si enquête il y a eu, on ne connaît guère les résultats fort savants de la chose. « Monsieur Fortin a été retrouvé, avec un couteau planté dans le flanc, sans vie. » C'est ce que nos amis les journaleux ont dit... Suicide? Un couteau dans le flanc? Si c'était en avant, dans le thorax en plein près du coeur, entre le côtes, je comprendrais mieux: si quelqu'un veut se suicider au couteau, c'est au coeur, qu'il se vise, pour ne pas souffrir des heures. Mais dans le flanc, à droite, là où il n'y a que du gros intestin et un rein, qui vont saigner durant une éternité de douleur affreuse, avant que ne survienne le décès vraiment? I don't think so! C'est trop louche et douteux pour moi qui ne suis même pas Sherlock Holmes, imaginez! Ça ne tient pas debout, ce présumé suicide. Eh! Faites-nous donc un petit suivi de l'affaire, nom d'un chien! Parlez! Talk to us! Dites quelque chose, merde! C'est la société de l'information? alors bon, INFORMEZ-NOUS! Parce que, moi, d'après moi, quand un gars décide de s'ôter la vie, il se procure un revolver, et se tire une balle dans la tête, pan! C'est la méthode rapide. Sinon, monter en cachette au sommet du Sheraton Hôtel, et se jeter. Jusqu'ici, tout va bien.

   En dernier recours, le bain chaud et les poignets ouverts. C'est lent. Faut du Willpower, comme on dit dans les jeux de rôles. Puis, lorsque toutes ces façons ont été éliminées, reste les pilules. Pas très brillant comme méthode. Encore plus lent que le bain chaud, et on a le temps de regretter comme dans la chanson de Leloup; et l'on se sent bizarre, engourdi, froid, raide. Et il y a de quoi paniquer bien sûr, à moins d'être Socrate. Faut encore plus de Willpower. Et en dernier recours, après la balle dans la tête, après le Sheraton, après le bain chaud, après les pilules, reste une dernière méthode: se planter un couteau soi-même dans le dos????????? Non franchement ne nous prenez pas pour des politiciens du Fédéral, quand même!

   Quand Kurt Cobain est mort, on a découvert qu'il avait résolu de dissoudre incessamment son groupe. Bon. Coïncidence? Non! Quelqu'un quelque part s'est dit qu'il serait plus payant d'avoir un « groupe légendaire » avec un « chanteur mort » comme les Doors, qu'une gang de bozos séparés s'essayant à des carrières solo! Voilà! Alors pour Dédé, qu'est-ce qu'on dirait? Je ne veux pas faire chier, doc, vous me connaissez, mais bordel, pourquoi ne nous donne-t-on aucun suivi sur cette affaire? Y a-t-il un pacte du Silence quelconque, quelque part? C'est quoi, le problème? Hep! On ne se plante pas soi-même un couteau de camping dans le rein, wake up, baby! Speak to me!

 *

   Vous êtes bien placé pour le savoir, vous, docteur, lorsque pour la centième fois les infirmières recommencent à faire du bruit. Les infirmières, j'en pense moi-même assez peu de choses. Et vais-je me faire encore beaucoup d'ennemis avec ça! Mais j'ai l'habitude et on ne nourrit pas un site Web pour être aimé; si on veut être aimé, on devient DJ... Cela dit, je sais que quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population ADORE les infirmières, Dieu seul sait pourquoi. Et ce même pourcentage écrasant de la masse, croit depuis toujours que la « hiérarchie » dans les hôpitaux (si l'on peut s'exprimer ainsi) est: a) Médecin, b) Infirmière, c) Patient. Hélas c'est archi-faux! Eh oui! Il existe une position intermédiaire. On ne la connaît pas. On n'en entend même jamais parler. Niet. Elle ne descend aucunement encombrer les trottoirs. Néanmoins elle existe bel et bien et c'est elle, c'est cette position intermédiaire et non l'infirmière sacro-sainte, qui « porte notre système de santé (hum! Ce qu'il en reste) à bout de bras », comme le veut l'expression très sommaire que l'on a beaucoup entendue depuis trois ans. Cette position intermédiaire, mes agneaux, c'est le (ou la) préposé(e) aux bénéficiaires. Ta-dam! J'ai rendu visite à un certain nombre de personnes hospitalisées de ma famille depuis quelques années, et je vais vous dire: je n'en ai pas vu, d'infirmières, excepté au poste. Les infirmières ne forcent pas du dos pour aider les patients en perte d'autonomie à se lever; elles ne touchent presque plus aux patients; elles ne changent plus les draps souillés ou simplement défraîchis; elle ne lavent pas les patients, ne leur coupent pas les ongles de pieds, et autres tâches peu reluisantes. Tout ceci, tout ce que je viens d'énumérer ce sont les préposées aux bénéficiaires qui s'en chargent. Elles, je les ai vues, souvent. Oui madame! Elles sont discrètes. Ah ça, pour crier, elles ne crient pas fort. Pour brandir des pancartes, non, elles ne brandissent pas fort. Voilà! Ce sont de petites dames, portugaises, roumaines, martiniquaises, et cetera. Elles ne sont pas syndiquées, d'après moi. Mais je les ai vues, souvent, et bien vues. Elles sont là. Elles sont partout dans les hôpitaux... et se cassent les reins à soulever de vieux messieurs en perte d'autonomie, s'éreintent une fois par heure à tourner de bord les patients invalides, dans leurs civières. Elles tordent les draps pleins de pipi. Ramassent le vomi et donnent patiemment des bains à des êtres dont le physique n'est, somme toute, pas vraiment identique à celui de Brad Pitt ou de Kate Moss ou de Cindy Crawford. Et vous vouliez quelqu'un qui « porte le système de santé à bout de bras »? There you have it. Ce sont elles qu'il vous faut. Et les infirmières, dans tout cela? Euh... quelles infirmières? Oh! celles qui donnent les piqûres... et qui apportent à heures fixes de petits contenants de plastique bien propres, avec trois pilules blanches dedans? Ces infirmières-là? Elles ne portent pas grand-chose à bout de bras hormis peut-être leur verni à ongles si vous voulez mon avis. Et puis, docteur, n'est-ce pas, elles sont rares les « Infirmières bachelières », comme on les appelle. Toutes les autres n'ont fait qu'une technique. Trois ans. Comme en soudure ou en plomberie. Et est-ce que les soudeurs ou les plombiers ont la cote d'amour inconditionnelle du public? Ben non.

   La véritable « chaîne hiérarchique » hospitalière ira donc comme suit: a) Médecin, b) Infirmière, c) Préposée aux bénéficiaires, et, enfin, d) Patient. Boom! Dur retour à la réalité. Oui je le sais il y a l'image « romantique » de l'infirmière à la Hemingway qui va au front avec les soldats, en 1943, en jupon blanc... Et il y a Jeanne Mance et les religieuses de cette trempe. Mais ça n'a plus beaucoup de rapport avec les infirmières d'aujourd'hui... Élargir les tâches du médecin vers le bas puis celles de la préposée aux bénéficiaires vers le haut escamoterait tout à fait le poste d'infirmière si vous voulez, ô docteur, mon humble avis. Mais, vous n'accepterez jamais, n'est-ce pas, vous, les médecins, de les donner, ces piqûres, et de les apporter, ces petites pilules, à heures fixes? Eh bien...

 *

   J'ai rêvé à des personnages bibliques saugrenus, qui avaient une sorte de contentieux loufoque et inexpliqué. Il y avait là Raphaël, l'un des Archanges. Il y avait Matthieu, l'un des apôtres (hélas on avait toujours un peu de mal à comprendre ce qu'il disait). Ensuite il y avait Judith, celle qui découpe des têtes (une sorte de cyborg avant la lettre). Et il y avait le roi David, c'est-à-dire, d'après la fort-peu-subtile logique du Monde de Morphée: moi, sans doute... Puis il y avait Étienne, le premier martyr, mais non le dernier (il y aura vous par la suite, lecteur, si vous n'y prenez pas garde).

DAVID Vos gueules, les mouettes!
JUDITH Nous n'avons pas d'ordres à recevoir de toi!
DAVID C'est moi le King!
MATTHIEU Blasenkatheter zum Einmalgebrauch!
DAVID Qu'est-ce qu'il dit?
RAPHAËL Qu'il n'est pas d'accord, je crois.
JUDITH Y a de quoi!
DAVID Quoi? Quoi? Une mutinerie? Une sédition?
MATTHIEU Engangskateter til blaeretomning!
DAVID Qu'est-ce qu'il a dit?
RAPHAËL Calmons-nous, massieurs.
JUDITH Oui, et à bas le King! C'est un épais!
RAPHAËL Comment? Qu'entend-je?
DAVID Je n'écoute pas un mot de ce que dit cette maniaque!
RAPHAËL Hum! Allons, allons...
DAVID Elle ne sait faire qu'une chose: des tronçons de têtes!
JUDITH Ça sert.
RAPHAËL Messieurs dame, du calme, je vous en prie!
MATTHIEU Blaascatheter voor für eenmalig gebruiksruk!
DAVID Qu'est-ce qu'il dit?
RAPHAËL Il n'a pas aimé le dernier film de Stallone, je crois...
JUDITH Je me sens en forme pour décapiter un con.
DAVID En tout cas, pas moi!
JUDITH Que si!
L'ÉPÉE Shlashc! (la tête de David choit).
JUDITH Une tête de Turc de plus à ma collection!
RAPHAËL Le King, un Turc?
ÉTIENNE Le premier martyr, c'était sensé être moi!
JUDITH L'Histoire peut changer.
MATTHIEU Kertakayttoinen virtsakatetri!
ÉTIENNE Plaît-il?
RAPHAËL Dieu seul le sait.
DIEU  Voyons, je ne suis pas C-3P0! Je comprends rien non plus!
JUDITH Bon, assez de tètage. Tout le monde à la maison!

   Pouvez-vous, docteur, m'expliquer ce que tout ce fatras signifie véritablement? Je ne suis pas fou j'espère...
 
 
 

David Pêle-Mêle 
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