Depuis les origines très obscurantistes de cette page, je m’efforce
de circonscrire mes jongleries, afin de faire des articles qui se tiennent,
et qui ont une certaine cohésion, mais malheureusement, tous mes
collaborateurs, cette bande de demeurés, ne se donne jamais la peine
de trouver des fils conducteurs à leurs élucubrations. Alors
je ne veux pas me faire chier, et je fatigue et j’ai décidé
de faire moi aussi un article comme une queue de veau, comme disent les
éleveurs. Vlan. En voiture!
Depuis que la nature se dégèle,
il règne dans les bureaux de Ma Commune Légère une
atmosphère bucolique et euphorisante nous pénétrant
d’une joie de vivre peu commune. Hier, il a fait vingt-huit degrés
et tous les membres de notre belle confrérie se sont retrouvés
sur le toit-terrasse pour jouir des premiers rayons du printemps – pendant
que les macaques rhésus, au sous-sol, rédigeaient l’article
que vous lisez présentement (il leur est interdit de parler d’eux-mêmes
à la première personne). Le sourire aux lèvres, nous
vaquions à nos activités estivales favorites : je me pavanais
devant le miroir, arborant mes plus belles pelisses d’été;
Pêle-Mêle repeignait tout son ameublement bleu (en bleu) en
chantonnant une douce mélopée (preuve de ma béatitude,
je m’abstenais de sortir ma cravache et l’annuaire de la ville de Montréal
pour le raisonner); Gary Del Monte nous concoctait des philtres à
l’algue mauve; Junior fumait la fenaison que Seb lui a laissée en
guise d’aumône (Seb qui, au moment où je vous parle, se noie
sur une côte corallienne africaine – pour faire changement); à
l’ombre de son baobab en carton, Kalypso se faisait une manucure d’orteils
dans la position du lotus; Dyke Kiri s’affaire a zieuter le large décolleté
que l’esthéticienne du dimanche (en transe) offrait nonchalamment
à la vue de tous. Finalement, Mon Marco étudiait à
la loupe un curieux spécimen de la famille des hyménoptères
qui vit en colonies nombreuses et organisées (une fourmi). En nous
regardant, il vint à mon esprit que nous pourrions facilement former
un groupe de musique. Aujourd’hui, c’est le look qui compte et, ici, tous
les ingrédients sont présents pour faire un carton.
Recette pour faire un groupe
a) Un fou. Nul groupe ne peut aspirer à
la renommée sans un fou en son sein. Black Sabbath avait
Ozzy Osbourne, qui décapitait des poupées vivantes, Kiss
avait Gene Simmons qui crachait le sang, eh bien, moi, je compte sur notre
déséquilibré à nous, Davey Pêle-Mêle,
pour guillotiner « live » de véritables poulpes morts
(de chez Shamrock, marché Jean-Talon).
b) Un marginal. Le marginal, c’est celui
qui fout le bordel là où il pointe son nez. C’est la vedette
aimée malgré elle. Celui qui a le majeur en constante érection
(et aussi autre chose, mesdames). Bref, c’est Gilbert Rozon! celui qui
est pourchassé jusque dans son lit par la presse à scandales
se jetant sur lui comme lui-même se rue sur les filles de rue : Gary
Del Monte.
c) Un drogué. Le drogué ne
fait jamais beaucoup parler de lui : il est effacé, à l’écart,
et comme constamment stupéfié par un stupéfiant non-identifié...
et bien entendu, c’est lui qui commence les « rifts » avant
de s’en aller backstage faire on ne sait trop quoi. Pour nous, ce sera
Junior.
d) Un révolutionnaire. Ça,
c’est Seb. Le révolutionnaire, c’est une sorte de Jean Leloup pour
le groupe : c’est lui qui fait illégalement entrer des macaques
rhésus dans les avant-premières, pour mousser un peu l’atmosphère
(et les ventes ultérieures). C’est l’homme à rajouter subrepticement
du Spanish Fly dans le bol de punch dès que Gary Del Monte en a
terminé la préparation (et Dieu sait ce que ce breuvage contient
même avant cet ajout : pas étonnant que les groupies se dénudent
complètement avant même notre premier rappel!).
e) La pitoune intelligente : Kalypso.
C’est comme Manon dans Balthazar : la fille qui joue de la bass tranquille
de son côté du stage, qui n’a pas l’air aussi soûle
que les autres (même parfois pas soûle du tout), un peu une
sorte de Louise Beaudoin dans le Parti Québécois, si le PQ
était un groupe rock (ça n’en est pas bien loin). La pitoune
intelligente a pour but d’attirer la clientèle mâle intellectuelle
qui ne trouve pas très sexy Pêle-Mêle ni Junior ni Del
Monte.
f) La lesbo-claviériste. Pour nous,
ce sera Dyke Kiri, notre saphique enjôleuse des ados ne sachant pas
tout encore des choses de la vie, et qui leur brise le cœur et qui fait
surtout vendre plusieurs exemplaires de notre compilation-« ballades
», ce qui nous permet de payer notre villa à Nassau et nos
piscines creusées.
g) Un beau blond frisé. Oui. Dans
tous les groupes, c’est de notoriété publique, il y a le
beau blond frisé. Il chante mal, il danse mal, et, pis encore, il
parle... bien. D’ailleurs, c’est pour ce dernier défaut que les
mamans l’aiment, et qu’elles jugent qu’il ferait un bon parti pour leurs
filles. Ces dernières auront la permission de placarder sur les
murs de leurs chambres les divers produits dérivés que nous
vendrons à l’effigie de ce séduisant blondinet au cheveu
ondoyant. À MCL, l’un des plus blonds et des plus crépus,
c’est le mouton de Pêle-Mêle, Woody Allan, mais je ne peux
retenir sa candidature, puisqu’il est béotien. En revanche, Mon
Marco correspond assez bien à l’archétype recherché.
Il a tout pour devenir le nouveau Justin Timberlake de N*SYNC, Robert
Plant de Led-Zeppelin, ou Patrick Normand de Magique-Moumoutte.
Enfin, l’impresario, le gérant,
le cerveau de l’affaire, le «big shot» derrière toute
cette petite mine d’or médiatique : le Rastaquouère, vous
l’aviez deviné. Je me gardais pour le dessert. Donc, voyez-moi plus
ou moins (plutôt moins que plus, mais c’est à votre convenance)
comme un René Angelil jeune et pas encore chauve (« loin de
là », dirait ma coiffeuse, Suzon, la fille aux ciseaux épuisés,
et ce, bien qu’à ma plus grande honte, je commence lentement, eh
oui, à caler un peu... autour des yeux). Le gérant, c’est
connu, est l’homme qui s’en met le plus dans les poches pour le moins d’effort
fourni proportionnellement. Il est le seul à connaître les
chiffres et à voir les livres de comptes qu’il conserve dans son
coffre-fort. Il dit aux autres (surtout au frontman du groupe) : «
Bon, on a fait tant de profits, tel pourcentage par show, et tant de ventes
de notre dernier album, ce qui fait que vous avez... dix dollars chacun!
Allez vous acheter des nananes! »
I (God) Bless America
Avez-vous écouté la télé-réalité
américaine The Bachelor? Pendant un mois, un mojo américain
était séquestré dans une fastueuse villa américaine
avec un harem constitué d’une vingtaine de nymphomanes américaines...
Comme le dirait Nash (surnom de Pêle-Mêle) : Yip baby! I
wanna be this guy! Malheureusement, à la fin de chaque émission,
le mojo américain devait éliminer l’une des nymphettes américaines
de son gynécée à la manière de Survivor.
Chaque fois, s’était un choix déchirant, et il pleurait comme
une Madeleine, voyant son cheptel se décimer progressivement. Lors
de la dernière émission de la série, alors que le
mojo américain doit jeter son dévolu sur une des deux bondinettes
américaines qui ont survécu aux diverses rondes éliminatoires,
le téléspectateur américain est témoin d’un
rebondissement inattendu, et, il va sans dire, digne des plus grands scénarios
américains : le mojo se transforme en homojo, il congédie
les deux dames américaines, et s’enfuit, en limousine, ça
va de soi, avec l’animateur de l’émission (un australien bien roulé).
Je suis présentement en communication avec le producteur de l’émission,
dans l’expectative d’obtenir les droits pour une adaptation québécoise.
J’ai déjà trouvé le nom gallo-romain que je donnerais
à mon émission : Bâche-Alors! Évidemment,
dans mon concept à moi, il n’y a pas d’éviction, et je suis
le satyriasis de service.
L’outrecuidant
Un nombre considérable de personnalités
québécoises nous ont écrites depuis que nous redoublons
d’âpreté dans nos propos. Pour n’en nommer qu’un, comédien
«fru» par excellence, j’ai nommé : Alain «l’outrecuidant»
Zouvi, qui nous a littéralement déclaré la guerre
en osant nous adresser la parole! Se pense-t’il immunisé contre
ma vicieuse verve virulente? Croit-il pouvoir attendrir ma cuirasse en
pavanant dans les talk-shows, avec ses bajoues de bouvier des Flandres
– me rappelant étrangement celles de mon idole de toujours, «Tricky»
Dick Nixon... Non monsieur! Je ne suis pas dupe de vos stratagèmes
de polichinelle à la noix de Grenoble! Faites-donc un homme de vous
! Je vous somme d’accepter de me confronter dans un match de bedaine chaude!
Ce soir, je vous attendrai devant votre repère : le Café-librairie
Les Pages Jaunes, à Rosemère, un lieu où les gens
se réunissent pour prendre des nouvelles et se raconter ce qu’il
y a de neuf. D’accord, je vous raconte donc ce qu’il y a de neuf : rira
jaune comme une Page Jaune qui rira le dernier... gros jambon!
Leçon aux apprentis-bitcheurs
Il n’y a pas qu’Ala-Ka-Zou (l’outrecuidant)
pour parler de notre personne en des termes de «vulgaire» et
«tête-de-veau». Ces insolences qui ne sont pas d’une
caméra, mais tout de même distinctes, reviennent plus copieusement
que d’autres dans les commentaires qui me sont adressés. Vous vous
demandez probablement, détracteurs anonymes et avoués, si
ces invectives caduques atteignent leur but, soit égratigner mon
petit ego tout rose et joufflu. Vous savez bien que non! Et, en tant que
dieu, j’aimerais remettre les pendules à l’heure (approximativement
à dix heures et quart a.m.). Sachez, calomniateurs de tout acabit,
que cette giboulée d’irrévérences puériles
est édulcorée par des épithètes ma foi assez
caudataires que vous laissez filer au passage, mu – je me dois de le souligner
– par une incurie peu banale... Oui, vous m’aimez en secret, et ce, de
façon tout à fait inconsciente – comme quand on se lève
la nuit pour se goinfrer de gâteau McCain Deep&Delicious
(avant de refermer le congélateur jusqu’à la prochaine fois).
Par exemple, Anne-Marie Losique m’écrit : «Tu n’es qu’un vulgaire
mojo.» Cette phrase savante est tout à fait caractéristique
de ce que la sommité mondiale dans l’art de la bitcherie (que je
me targue d’être) qualifierait, pour votre bon entendement, de «mi-chaude/mi-froide».
Ici, le mot «mojo» que je qualifierais, toujours pour votre
bon entendement, de «mot-gentil», joue le rôle d’une
crémaillère empêchant la marmite de tomber dans le
feu : quelle belle image culinaire! C’est-à-dire que l’effet dévastateur
(le feu) qu’aurait pu constituer pour mon équilibre mental (la marmite)
le mot «vulgaire», que je qualifierais de «mot-pas-gentil»,
pour votre sempiternel bon entendement, est contrecarré (la crémaillère)
par le mot-gentil qu’est le mot «mojo». Il faut donc être
sur vos gardes lorsque vient le temps de me servir une concoction de vos
enfantines billevesées, mesdames et messieurs du gratin... Mots-gentils
et mots-pas-gentils sont des antagonismes dans mon book à moi. Mais
il ne faut pas croire qu’un mot-gentil annule systématiquement l’effet
d’un mot-pas-gentil. Ainsi, le mot-gentil «allô» associé
au mot-pas-gentil «tête-de-veau» dans la phrase-témoin
mi-chaude/mi-froide «Allô, tête-de-veau!», n’arrive
pas tout à fait à annuler l’offensive verbale, et verbeuse
(c’est d’ailleurs à ce moment que la crémaillère se
démantibule, que la marmite remplie à ras bord de camouflets
choit dans les flammes, et que je pète les plombs). Dans ce dernier
exemple, je vous ai joué une petite fourberie qui n’est pas de Scapin,
et sans malice; avez-vous remarqué de quoi il s’agit? C’est facile
: en fait, le mot «allô» n’est pas vraiment un mot-gentil,
pas plus que le mot «tête-de-veau» n’est un mot-pas-gentil;
en vérité il était davantage question d’une phrase
mi-tiède/mi-chaude, les termes seraient plus justes, car le mot
«allô» est considéré par les spécialistes
de la sémantique comme étant un «mot-gentil-mais-pas-tant-que-ça»
et le mot «tête-de-veau», quant à lui, est considéré,
toujours par les mêmes experts en rhétorique, comme étant
un «mot-pas-gentil-du-tout-du-tout».
Rastaquouère
MacO'mmune
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