DE LA NATURE DES TALIBANS
par Seb Patry
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    Lorsque les soviétiques ont envahi l’Afghanistan en 1979, des millions d’Afghans ont fui au sud-est afin de gagner le Pakistan. Une génération d’enfants ont grandi dans ces camps de réfugiés, avec pour seule éducation les Medersas et les écoles coraniques où l’on enseignait principalement le Coran et les canons de l’Islam. Ces grandes écoles ont pu prospérer puisqu’elles étaient toutes subventionnées par les Saoudiens (dont Oussama Ben Laden). Une fois cet endoctrinement « religieux » complété, ces étudiants étaient transférés dans des camps d’entraînement a vocation militaire, commandités, eux, par la CIA, via les Services secrets pakistanais. Une grande majorité de ces élèves sont des Patchouns appartenant a un groupe ethnique également réparti de part et d’autre de la frontière pakistano-afghane, et, de par le fait même, de telles « migrations » des deux côtés de la frontière leur semblaient aussi naturelles que de traverser une rue. À ce point de l’histoire, il est important de noter que les futurs Talibans sont au début de la vingtaine et n’ont, pour la plus grande part, jamais mis les pieds en Afghanistan : le pays de leurs parents est à ce moment déchiré par une guerre civile entre Afghans fidèles au commandant Massoud, pro-Iraniens du Hezbollah, Ouzbeks de Doustom (tous plus ou moins « vainqueurs » des soviétiques).
    Lorsque les Talibans reviennent en Afghanistan, c’est avec le soutien de divisions armées complètes pakistanaises, et c’est à ce moment que le monde entend parler pour la première fois de ces « Talibans », terme qui signifie « séminaristes ». Ils installent dès lors leur capitale à Kaboul, mènent une guerre victorieuse, et étendent leur influence sur l’ensemble du territoire auparavant déchiré par les querelles intestines. Plusieurs milliers d’expatriés volontaires (issus des quatre coins du monde arabe) gagnent à cette époque les montagnes de l’Afghanistan pour se joindre à la guerre de guérilla, et se fixent par la suite majoritairement a Peshawar, où ils sont encore, aujourd’hui.

   La culture de l’opium en Afghanistan est l’une des seules façons pour les gens du commun de tenter de lutter contre la pauvreté, tandis que plusieurs guerres continuent de déchirer le pays dans les régions du nord (commandant Massoud, entre autres). Ces conflits perdurent encore de nos jours et ne sont pas près de cesser, même à la lumière des événements récents, puisque le peuple afghan est une race téméraire et « guerrière », habituée, depuis trente ans, à mener une existence rude dans un pays qui n’a connu aucune année de paix, et dont il ne subsiste pratiquement aucune infrastructure digne de ce nom… D’ailleurs, à la frontière ouest de l’Afghanistan, lorsque les « Passeurs » (trafiquants d’opium) se heurtent aux troupes iraniennes, ce ne sont pratiquement jamais ces dernières qui ont le dessus, puisque les Passeurs sont doublement mieux équipés que les soldats de la nation voisine. Dans cette culture, la tradition séculaire de l’hospitalité revêt une importance fondamentale, et c’est l’une des clefs de la situation diplomatique présente, puisque tant que la culpabilité (entre autres) d’Oussama Ben Laden ne sera pas prouvée aux yeux du monde, en dehors de tout doute raisonnable, les Talibans n’accepteront nullement de le livrer à la «Justice » de ceux qu’ils considèrent comme des païens indignes. Les édits terribles du mollah Omar semblent absolument inacceptables, mais à quoi pourrait-on bien s’attendre de la part de gens qui ont été formés « à la dure » dans des instituts religieux aussi sévères et qui ont ensuite passé par le moule assez contraignant des camps d’entraînement militaires.

   Si l’Occident voit un monstre dans le régime des Talibans, et dans les Talibans en tant que tels, c’est en quelque sorte parce qu’il se regarde lui-même dans un miroir. Cette genèse un peu méconnue, un peu hiératique: écoles subventionnées par les Saoudiens, CIA, services secrets pakistanais et tutti quanti, a fait des Talibans exactement ce qu’ils sont aujourd’hui, et le docteur Frankenstein (U.S.A.!) a plus que sa part de cauchemardesque responsabilité dans cette affaire dont on n’a pas fini d’entendre parler.
  


Seb Patry 
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