COMMENT SE METTRE QUELQU'UN ADO
par Rastaquouère MacO'mmune
.
Il faut que je vous le dise, nombre de nos lecteurs croient que nous sommes une bande d’adolescents puérils et boutonneux depuis que nous avons avoué aimer jouer, des fois, jusqu’aux petites heures de la nuit, avec des cartes de Makémon Léger - une nouvelle sorte de Pokémons. Pour faire mentir la rumeur, j’ai eu l’ingénieuse idée de vous concocter cet article provocant traitant justement des ados. 

Selon les règles établies par notre beau et transcendant rédacteur en chef - moi-même - mon papier sera truffé de médisance, sans toutefois tomber dans le blasphème, et vous verrez que les sceptiques seront confondu-du-du-du (quel beau « du »). En effet, vous en conviendrez, il serait contre ma nature et celle de mes compères de nous auto-bitcher. 
L’autre jour, sortant du commerce de mon taxidermiste préféré, je tombai nez-à-nez avec un troupeau de boutons. Ils fumaient des botches de cigarettes en maugréant sur je ne sais quoi. 

- Tsé Man! Rapport... 
- Sérieuhhh...
- Ha-oué! Ha-oué! Yé slow man!
- Ha-oué! Full pas hot à soir le Stemby...

C’est à ce moment qu’un grand noir nommé vraisemblablement Stemby fit une bruyante apparition au sein de l’attroupement. Par sa démarche clopin-clopante découlant d’un fond de culotte trop bas (flotant à dix-huit pouces de son entre-jambe) et l’excitation palpable des autres qui trépignaient à son arrivée, j’en conclus qu’il devait être le Chef.

- Yo! Yo! Babylone! Hen! Hen! Hen! Represent! Represent! Des poyaïts! I’m the Gorgon! Hen! Hen! The gorgon, the gorgon, the gorgon! Stemby White Teeth is in the house!
- S’lut!
- Represent!
- Yo Stemby!
- Sérieuhhh...

Je m’exclamai alors:

- Heille, le pas-de-cuisses! Tu n’es pas dans la maison, tu es dehors, l’enfant-tronc!

Ils restèrent pantois, comme des vaches me regardant passer (moi, un train). Puis, ils remarquèrent sous mon bras l’ornithorynque fraîchement empaillé, devant servir de centre de table durant nos repas au Bureau  (et devant aussi remplacer, lors du réveillon de Noël prochain, à la fois le Boeuf et l’Âne, dans la crèche, car je prends de l’avance, et le Petit Jésus, ce sera une poupée Dick Nixon habillée en Santa Claus puisque tout le monde SAIT que Santa Claus c’est le Petit Jésus). Cela me rappelle: je dois envoyer ma pétition au Sénat américain afin d’exiger que l’agréable physionomie de «Tricky Dick » fût gravée dans la paroi du mont Rushmore par-dessus la figure de Lincoln, avec sa chemise fleurie hawaienne qu’il portait lors de sa visite en Chine (historique) et où les indigènes pensaient qu’il était le plat de résistance. (On mange de l’ornithorynque dans certaines îles du Sud?)

- Yo! Yo! Check la bibitte poilue!
- Rapport!
- Rapport!
- Rapport!
- Rapport!
(Ils sont quatre.)
- Yo! 
(Lui, c’est le Chef.)

Je leur criai qu’il ne s’agissait pas d’une bibitte, mais bien d’un ornithorynque, mammifère amphibie et ovipare qui vient d’Australie, à bec corné, à longue queue plate, aux yeux vitreux, au sourire niais, à la langue fourchue, aux pattes maigrichonnes, etc. Ils restèrent pantois, encore. Puis, le Chef  m’agressa après un bref caucus en hurlant: On Veut La Bibitte!

Me souvenant subitement de Michael Jackson, je me plaçai de dos et je commençai à « moonwalker » en direction opposée. Eux, avec leurs Baggy Pants qui leur allaient aux genoux, ils devaient courir comme des pingouins, en se tournant le cul à gauche, à droite, à gauche, à droite, à gauche, à droite, à gauche, à droite (ils n’ont avancé que d’un mètre jusqu’à date)... et à gauche, à droite, à gauche, à droite, à gauche, à droite (deux mètres à présent). Moi, tout en « moonwalkant » expertement, j’avais déjà fait vingt mètres au moins. Les ados ne purent jamais me rattraper, mais je les entendis grommeler:

- Yo! Yo! Motherfucker!
- Rapport!
- Rapport!
- Rapport!
- Rapport!

C’était sans doute un Code secret fort complexe, car mon espoir en l’Homme et en l’Avenir m’empêche de croire que des êtres humains puissent, en l’an 2000, encore proférer des onomatopées pratiquement monosyllabiques aussi nulles et dépourvues de sens, par automatisme bestial, comme des chiens qui aboient en voyant un chat, par simple réaction par-rapport à un stimuli donné qui est toujours le même. Ils criaient effectivement « rapport » sur un ton un peu plus aigu chaque fois, changeaient d’intonation, de fréquence, d’amplitude et de modulation; le « r » initial du mot semblait prononcé de manière palatiale une fois sur trois à peu près, et de façon linguo-dentale le reste du temps. J’eus peur qu’avec leur code ils soient en train, comme les crocodiles, d’appeler à l’aide leurs autres amis, et que je me trouverais coincé incessamment comme dans un bayou fangeux, entouré de jeunes sans-cuisses murmurant des « rapport » tout pleins d’allégresse victorieuse.

Mais non, finalement. Ce n’était pas un Code d’aucune sorte. Je les ai semés. Ils sont restés là-bas, empêtrés comme des autruches cul-de-jatte dans leurs pantalons-sacs-à-patates, en criant « Yo! » Je suis rentré tranquillement jusqu’au Bureau sans en rencontrer un seul autre. Quand j’ai monté l’escalier, Junior m’a lançé joyeusement son « Yo! » bien à lui. Quelle misère, ces ados! 
  


Rastaquouère MacO'mmune 
.
..
OPTIONS DE NAVIGATION
HAUT DE LA PAGE - ACCUEIL - CONTES ET RÉCITS - VIE COMMUNE - BASTONNADE
DÉSOBLIGEANCE - BARATINAGE - LIENS FAVORIS - TEXTES DIVERS - NOS HOMMAGES

Hit-Parade

.

© 1997-2001 Rastaquouèbec Divertissement -Tous droits réservés